jeudi 30 mars 2017

Pas d'Internet des objets sans écosystème

Cette semaine, c'était l'effervescence à Paris pour les acteurs de l'Internet des Objets (IoT) avec à la fois l'IoTWorld et la conférence LPWAN. L'Internet des objets, cette infrastructure qui se développe sur l'internet mondial, se déploie dans l'entreprise et les collectivités locales pour des applications plus industrielles au cœur de la transformation numérique.


Dans ce contexte, GreenSI s'est penché sur les prévisions du cabinet IDC en matière d'IoT. Des prévisions très pertinentes sur plusieurs points, en tout cas plus originales que celles qui se contentent de projeter de façon linéaire l'internet actuel à l'échelle de 50 milliards d'objets.

Mais connaissez-vous le LP Wan, le Low-Power Wide Area Network ?

Dans un contexte d'entreprise numérique étendue, le WAN dépasse les murs de l'entreprise et parfois a besoin de se déployer là où il n'y a pas d'énergie pour alimenter les objets qui émettent des mesures permettant de numériser les processus. La disponibilité d'une place de parking dans la ville est facilement mesurable par un capteur dans la chaussée, mais celui-ci doit avoir de l'énergie pour émettre régulièrement son état et signaler que la place est disponible. 

C'est là que ces liaisons sans fil à faible consommation énergétique sont de plus en plus utilisées. Elles permettent de maîtriser la durée de vie des batteries dans les capteurs (durée de vie de 20 ans nécessaire dans certains cas!)

Cela concerne bien sûr les villes et les collectivités locales qui gèrent leur aménagement, mais aussi les entreprises pour tracker les processus de bout à bout, notamment dans la logistique ou le suivi de chantiers.

Pour l'OVUM dans une récente étude, le LPWAN, longtemps réservé aux distributeurs d'eau ou de gaz (l'electricité utilise son propre réseau électrique) devient une tendance forte dès 2017.  Ses usages vont se multiplier, mais aussi ses technologies avec l'arrivée du NB-IoT (à bande étroite IoT) et du LTE-M (Long Term Evolution pour machines).

C'est donc cette semaine que GRDF, SUEZ, Sagemcom et une trentaine d'autres acteurs, historiques ou startups, ont choisi pour annoncer leur alliance: l'Alliance WIZE. Ils ont rappelé au marché que leur technologie éprouvée depuis plus de 10 ans fait l'objet de milliards d'investissements (à comparer aux 150 millions d'euros levés récemment par Sigfox), et se déploie massivement sur les territoires pour télérelever les compteurs d'eau et de gaz.
Alors pourquoi ne pas réutiliser cette infrastructure, dont la fréquence est normalisée et la qualité de service est connue, pour d'autres usages ?



Libérée au niveau de l’Europe à l’aube des années 2000, la fréquence 169 MHz utilisée par ces opérateurs, largement intégrée par les fabricants de semi-conducteurs dans des composants radio de faibles coûts, offreune portée de plusieurs kilomètres en champ libre. Elle permet aussi des débits compris entre 2400 et 6400 bits/s, qui permettent d’échanger des télégrammes de plusieurs dizaines d’octets.

Le réseau n'est bien sûr qu'une partie de la solution pour assurer les nouveaux usages, mais ses caractéristiques physiques, comme le besoin en énergie ou le fait que les communications soient bi-directionnelles, en font un élément de choix essentiel. Il est donc vraisemblable que l'avenir sera fait de plusieurs réseaux, dont la fidèle 3G/4G (et dans 3 ans 5G), mais aussi d'autres réseaux longue portée (WIZE, Sigfox, LoRa,...), qui seront choisis en fonction des usages.

C'est finalement plutôt une bonne nouvelle pour les DSI soucieux de la pérennité de leurs investissements de pouvoir faire ce choix.
Sigfox, très présent dans les médias, pouvait nous laisser croire qu'il n'y aurait qu'un seul réseau IoT qui traiterait tous les usages. Il n'en est rien. Sigfox est par exemple vu par l'analyste IDC principalement pour les applications non critiques, pour une partie relativement faible de l'ensemble des applications.


La ville et les infrastructures ne sont d'ailleurs pas le seul usage de l'IoT.


Pour IDC, en 2017, les véhicules connectés, les objets pour le bien-être personnel et les bâtiments intelligents seront à l'honneur dans l'ensemble des régions du monde, et représentent $96 milliards en dépenses. Reprenons maintenant les principales prévisions d'IDC sur l'IoT dans les 3 prochaines années :
  • Le smartphone reliant en bluetooth les objets personnels par millions sera dominant pour le B2C - ou directement en WiFi - et n'aura pas besoin d'autre réseau. En revanche, pour le B2B la collecte sera facilitée par les réseaux étendus de faible puissance LPWAN.
  • D'ici 2018, l'enjeu pour les entreprises se situe dans la remontée d'informations, via des capteurs ou des mesures bien situées le long des processus opérationnels pour en améliorer l'efficacité.
  • Un besoin au départ principalement interne à l'entreprise. Mais d'ici 2018, le besoin d'une plateforme "Open Data" se fera sentir et structurera les choix et les architectures. Les entreprises ayant déjà investi dans des solutions de plate-forme IoT pour ses besoins internes devront alors les ouvrir sur leur écosystème ou se synchroniser avec ces nouvelles plateformes "Open Data".
  • A mesure que l'adoption de l'IOT croîtra dans les principaux secteurs de l'industrie, du gouvernement et des consommateurs, le besoin de confiance dans ces donnés fera que 20% de tous les déploiements d'IOT auront des services Blockchain activés pour assurer la traçabilité au sein d'écosystèmes.
  • De plus, au moins 40% des données créées par IoT seront stockées, traitées, analysées et mises en œuvre à proximité ou en bordure du réseau, donc dans l'architecture de ce réseau et non dans des plateformes centralisées.
  • Les fabricants d'équipement IoT devront également améliorer leurs sécurité et leur traitement de la confidentialité, qui actuellement est la faille principale de ces systèmes.
  • D'ici 2019, 40% des collectivités locales et régionales utiliseront l'IOT pour transformer les infrastructures (routes, lampadaires, réseaux...) en actifs au service de l'évolution des villes à l'ère du numérique (Smart City). La quantité de données produites en constante augmentation permettra de poursuivre des stratégies d'analyse en continu et d'apprentissage par la machine au lieu de programmer les règles et seuils de pilotage de la performance.
Pour GreenSI, cette perspective est pertinente sur plusieurs points :
  • le fait que l'IoT est bien une infrastructure partagée par des écosystèmes, avec sa propre architecture, qui va se mettre en place progressivement avec ses standards, et non la vision d'un seul opérateur de bout en bout,
  • dans cette architecture la blockchain, autre technologie structurelle pleinement opérationnelle vers 2020, trouve bien sa place pour gérer des transactions au sein des écosystèmes qui vont se développer sur l'IoT. D'autres services se développeront au sein de cette architecture.
  • l'apprentissage se fera en interne dans chaque entreprise mais c'est bien la perspective externe et l'ouverture qu'il faut viser dès le départ pour éviter de remettre en cause ses investissements,
  • enfin, en B2Bn la sécurité est un élément essentiel à intégrer tout au long de la chaîne, ce qui est loin d'être le cas des déploiements B2C actuels (voir: les objets connectés sont des passoires).
Pour McKinsey, dans son étude sur l'impact de l'IoT sur les différentes industries, le potentiel de création de valeur de ces écosystèmes à l'horizon de 2025 sera principalement dans les usines et les villes (compteurs intelligents, éclairage urbain, parkings, environnement,...). C'est donc certainement ces deux cas d'usages qui vont structurer fortement l'architecture et les infrastructures de l'IoT à ce même horizon.



Pour les SmartCities, la présentation il y a 10 jours de la vision du Grand-Dijon qui mobilise plus de 100 millions d'euros pour mettre en place une gestion centralisée de l'espace urbain, intégrant la signalisation, l'éclairage... complété par une démarche unique d'open data s'inscrit totalement dans ces tendances IoT. Elle est le signe de ce changement de braquet des projets de villes intelligentes et montre, si on en doutait, le savoir-faire français après les premières vagues de technologies des géants américains il y a 5-7 ans.

Dans ce contexte, l'écosystème de la nouvelle Alliance WIZE (169MHz), qui vise les collectivités et les industriels et qui utilisent des passerelles sécurisés installées sur des toits d’immeubles, est certainement une technologie qui assurera de façon perenne de multiples usages aux côtés des autres réseaux déjà existants.

Sans aucun doute l'avenir sera celui des écosystèmes et de l'interopérabilité.
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