samedi 28 avril 2012

Les nouvelles évidences numériques de la Génération Y au lycée

Green SI a rencontré la fameuse génération Y et s'est intéressé à ses usages de l'informatique et de la téléphonie.
Oh, il ne s'agit pas d'une étude complète sur un échantillon représentatif, mais juste de l'interview d'un seul jeune. Mais un jeune qui a inséré seul le numérique en classe quand l'Education Nationale cherche toujours par quel bout prendre le sujet. Il nous livre en miroir une foule de questions sur notre approche du numérique et nos propres usages.

GreenSI : Bonjour, Yohann. Tu as 16 ans et tu es élève en première S. Tu utilises chaque jour plusieurs terminaux. Est-ce que tu peux nous les présenter et nous parler de tes usages?
J'ai un Windows Phone comme compagnon numérique, un eePC portable quand je suis à l'école, mais j'utilise un ordinateur tour à la maison pour les jeux en ligne ou le travail personnel. Il a deux écrans car c'est plus pratique. Je stocke tout sur un disque dur externe de 1To. J'ai aussi une console de jeux, mais pas dans ma chambre. Toute ma musique est numérique et est sur mon le téléphone pour l'avoir toujours sur moi. Ce qui m'a fait choisir un casque audio pouvant aller sur un téléphone ou en USB.

GreenSI : Tu n'as de tablette?
Non, c'est pour ma mère! Je consulte plus de vidéos que de textes et c'est plus pratique sur un grand écran que sur une tablette. Elle ne me servirait pas et elles sont plus volumineuses à transporter que mon téléphone.

GreenSI : Pas de TV non plus dans ta chambre?
Non, car je la regarde peu et uniquement sur mon ordinateur. Les sites de replay et de VOD me permettent de ne pas rater les quelques émissions que j'aime. J'ai un grand écran de projection qui se déplie dans ma chambre pour regarder des films avec mes amis qui amènent un rétroprojecteur.

GreenSI : quel est le premier terminal que tu utilises le matin? le dernier?
C'est le téléphone. Je regarde les messages SMS de la nuit ou de mes camarades qui sont déjà à l'école pour savoir par exemple si un professeur est en retard ou absent. Ensuite je regarde la météo, les news et le top tweets qui complète bien les news dont les journaux ne parlent pas encore. Tout cela dans la tuile "Maintenant" de mon Windows Phone qui est très pratique.
Avant de me coucher, un dernier regard sur mon téléphone en train de se recharger.

GreenSI: tu aimes bien Windows Phone, pourquoi et quels sont tes usages?
Je dirais la simplicité. Dans un monde où on a un nombre de besoins fini et un nombre d'applications infini, la règle de survie c'est de savoir quels sont tes besoins de façon précise. Ensuite grâce à la page d'accueil tu peux y accéder rapidement. Pour les besoins moins fréquents ou nouveaux, il sera bien temps d'aller fouiller dans un catalogue d'applications.

Mes applications sur ma page d'accueil sont Facebook, Twitter, SMS, google, la météo et le Figaro qui est une application bien organisée: le flash, les dernières infos, les catégories. Je consulte régulièrement les catégories culture, actualités et économie. Un seul journal me suffit.

Un second bon point pour Windows Phone c'est la communication. Encore une fois c'est simple d'accès: une conversation commence par SMS et peut se terminer sur Facebook et MSN, et je trouve tout au même endroit. Je partage mes photos en un clic sur Facebook, Twitter ou via un SMS. La fonction "quoi de neuf?" permet d'avoir les nouvelles de ce qui s'est passé dernièrement avec mes copains.

GeenSI : Et Apple?
C'est cher. On rencontre de plus en plus d'élèves qui disent que c'est une "machine a fric" et dans mon lycée il y a un début de réaction "anti Apple".
Android est populaire, mais encore "bas de gamme" et pas encore aussi fini qu'Apple ou Windows.

GreenSI : tu utilises un ordinateur portable à l'école en première S, qu'est ce qu'il t'apporte comment tu t'organises ?
C'est un Asus que j'ai choisi pour la longévité de sa batterie, son faible poids et son prix, moins cher qu'un portable. C'est un usage d'ordinateur satellite de celui qui reste dans ma chambre. Il a le wifi et quand je rentre mes documents se synchronisent avec Goodsync.
J'utilise aussi Skydrive avec mon groupe de TP, ou mon trinome projet. Comme cela on partage automatiquement les documents avec mes camarades, depuis un PC ou depuis mon téléphone.
Je ne l'utilise que pour le travail en classe et pas pour les jeux. Je prends mes notes de cours dessus depuis la seconde. Cela permet aussi de compléter les informations du cours directement pendant la classe. L'autre jour un professeur ne se rappelait plus exactement le nombre de cellules dans le corps humain, je lui ai proposé de regarder et on a pu vérifier en quelques secondes qu'il y en a 10 puissance 14. Dans un autre cours, en espagnol, on a pu écouter une musique en rapport avec la leçon et la commenter ensemble. Les classes seraient plus interactives si les élèves et les professeurs partageaient plus de contenus numériques pendant les cours.

GreenSI : quels sont tes freins à l'usage d'un ordinateur en classe aujourd'hui?
Ce qui manque c'est le Wifi dans les classes. En fait il y en a dans l'école, mais il est réservé aux profs... qui n'ont pas d'ordinateurs. 
Aujourd'hui on est 4 a utiliser un ordinateur, il n'y a que 6 prises de courant dans la classe. La bataille pour l'accès aux prises n'a donc pas encore commencée, mais elle pourrait venir...

GreenSI: quand tout ça ne marche pas comment tu fais?
Beaucoup de fonctions sont redondantes, par exemple je peux aussi envoyer un SMS ou téléphoner avec mon ordinateur. Cela permet de se débrouiller le temps de trouver le problème. 
Ensuite je m'appuie beaucoup sur les forum (ex. www.monwindowsphone.com) où  je peux expliquer mon problème et chercher des solutions.
Sinon il y a aussi une entraide dans la classe où les deux bons en informatique aident les autres. Jusqu'à présent je m'en sors.

GreenSI: et au niveau de la sécurité?
Je sais que ce n'est pas bien, mais la sécurité c'est secondaire pour les jeunes. Une fois qu'on a un antivirus on ne s'occupe plus de rien. De toutes façons ce que j'ai en numérique n'a pas de valeur et n'intéresse personne. Et si je le perds et bien tant pis.
Mes fichiers sont cependant sauvegardés sur mon disque externe.

GreenSI: comment tu vois l'avenir? Qu'est ce qu'il faudrait développer?
Aujourd'hui les échanges d'information sont très faciles et pourtant en ce qui concerne les cours, la plupart des communautés sont payantes organisés par des entreprises. Il suffirait pourtant comme sur Wikipedia que chaque élève contribue et on pourrait améliorer les contenus collaborativement. Entre copains du lycée et pourquoi pas d'autres lycées. Je suis prêt à donner mes cours numériques gratuitement et j'aimerai travailler avec d'autres élèves sur des synthèses pour préparer mon Bac l'an prochain.

Certains professeurs se mettent à l'informatique et en tout cas dans ma classe tous acceptent que les élèves aient des ordinateurs en cours, mais les échanges avec eux se limitent à la clef USB. Les espaces partagés de l'école sont très peu utilisés. Il y a donc beaucoup de progrès à faire.

Aussi pourquoi mes livres sont encore au format papier et pèsent plus de 10kg? Ils sont fournis par l'école. Si je veux l'un des rares livres scolaires numériques qui existent je dois l'acheter à nouveau, pourquoi?

A l'avenir j'aime l'idée de Microsoft de pouvoir via Zune, partager des fichiers, musiques ou films entre la XBox, l'ordinateur et le téléphone. Je voudrais des interfaces encore plus simples qui savent ce que je veux faire.

GreenSI : merci, Yohann, et bonne chance pour ton Bac!

Vous avez peut-être déjà le même à la maison!
Alors sans attendre que des bataillons de Yohann débarquent dans les entreprises, GreenSI remarque que certains usages et certaines "nouvelles évidences" émergent.
Elles rappellent des débats dans l'entreprise comme le BYOD ou la "consumerisation" de l'informatique :
  • Le premier point est certainement cette confiance absolue en la technologie, qui doit marcher, être simple, et se charger toute seule de la sécurité. Pas besoin de les convaincre d'utiliser un agenda électronique pour mieux le partager, comme on le fait encore avec certains en entreprise, mais ça doit marcher. Pas Geek mais Pratik.
  • La communication règne en maitresse et est partout, ceux qui n'ont pas de téléphone laissent des sessions de jeux en ligne ouvertes pour en utiliser la messagerie instantanée.
  • Ensuite, les frontières travail domicile qui s'estompent, ou qui se déplacent comment sur les deux écrans, l'un pour travailler et l'autre pour communiquer avec MSN et jouer... en même temps.
  • Au contraire on recherche la continuité numérique des données entre les terminaux et la capacité à avoir un terminal adapté à chaque ergonomie. Le travail et le domicile ne sont finalement que deux situations ergonomiques différentes sur les mêmes données et pour la même personne.
  • Les préférences des utilisateurs peuvent quitter le rationnel comme le choix de la marque ou du ressenti, ce qui peut amener à accepter les choix des utilisateurs sans chercher à les mettre dans une matrice d'arbitrage validée par les achats...
  • L'importance de l'interface
  • Il faut savoir filtrer les informations pour survivre au déluge d'information, et laisser une place a la personnalisation des filtres
Et pour terminer, on est à l'aube de repenser nos modes de travail et de collaboration dans la société de l'information. L'Education Nationale a certainement du boulot, mais ce ne sont pas les seuls. Et si on ne le fait pas, d'autres Yohann s'étant approprié le numérique s'en chargeront sans nous dans quelques années et sans nous demander notre avis.

L'humour de ceux qui aiment le numérique